2018
04/Juin

Et si on arrêtait de faire des compétitions pour valoriser le savoir-faire?

Dans quelques jours s’ouvre la 65ème édition des Cannes Lions, une compétition de plus pour des agences de communication qui ne parviennent pas à enrayer leur déclin.

 

Ce qui faisait la force de cette profession, à savoir la compétition autour d’idées créatives, provoque aujourd’hui sa ruine. Force est de constater que le marché a profondément changé depuis la loi Sapin et que l’émergence du digital a induit une multiplication des canaux de communication. Alors si la compétition avait toute sa place au temps de la télévision unique reine des médias et des budgets pharaoniques, elle devient contre-productive et destructrice de valeur aujourd’hui que les dispositifs de communication se sont complexifiés et que les budgets se sont fragmentés.

 

Une agence ne peut plus raisonnablement réaliser gratuitement en avant-vente l’ensemble de la stratégie et de la création d’une campagne en n’ayant qu’une chance sur quatre, voire même une chance sur dix, de gagner un budget qui n’est souvent pas plus important que l’investissement réalisé. C’est la profession dans son ensemble qui perd de l’argent.

 

Face au déclin des agences, d’autres acteurs tentent déjà de prendre leur place. Les médias montent directement de plus en plus d’opérations spéciales pour limiter l’érosion des revenus publicitaires. Les GAFA automatisent la création et l’optimisation des dispositifs. Les cabinets de conseil débordent de plus en plus des technologies vers le marketing et la communication, forts de leur modèle économique beaucoup plus rentable, basé sur la vente de temps passé et de méthodologies. C’est dommage, car les agences présentent de nombreux atouts que n’ont pas ces autres acteurs.

 

Diversité de compétences

 

Elles sont les seules à offrir une large diversité de compétences: elles savent faire travailler des créatifs bien sûr mais aussi des stratèges et des opérationnels, elles savent s’engager intégralement sur un projet de sa conception à son exécution. J’en sais quelque chose: moi qui ai longtemps été consultant en stratégie avant de créer l’agence 1min30, j’ai effectivement beaucoup souffert de ne pas pouvoir accompagner un projet jusqu’au bout et de devoir systématiquement m’arrêter à la présentation des Powerpoints.

 

Plutôt que de continuer à décliner en célébrant les compétitions autour d’idées créatives, j’invite la profession à changer sa façon de se vendre en s’inspirant des consultants et des entreprises de services numériques. Il s’agit pour moi d’arrêter de vendre des idées, mais de vendre la méthode et les hommes qui vont travailler à co-créer ces idées directement avec les clients. C’est pour moi la garantie d’une croissance soutenue pour l’ensemble d’une profession qui a un rôle essentiel à tenir pour développer l’ensemble de l’économie. Car malgré tout, seules les idées, la création et l’innovation ont de la valeur, et les agences en sont les expertes.

 

Gabriel Dabi-Schwebel est l’auteur du livre Croître ou Mourir, il faut choisir (ed. 1min30 Publishing).

 

Extrait de : « Et si on arrêtait de faire des compétitions pour valoriser le savoir-faire? » paru dans Stratégies

Gabriel Dabi-Schwebel

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Ingénieur de formation, j'ai accompagné notamment pour Alcatel, TF1, SFR et Lagardère Active le lanc





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